Perag taùein bepred, pen dé er wirioné ?

10 février 2009

Sylvie Goulard et la Turquie

Je me réjouis vraiment de voir Sylvie Goulard mener la liste MoDem dans notre région pour l'élection européenne. Je la connaissais peu avant qu'elle ne soit élue présidente du mouvement européen France. Je me souviens avoir alors interrogé François Goulard sur son blog parce que le nom me faisait craindre une trop grande sympathie avec l'UMP. Il m'avait expliqué, avec le retard qui lui est habituel, qu'elle était sa belle-soeur, mais j'avais mené mon enquête entre temps et j'avais remarqué combien elle était saluée de tous bords comme quelqu'un d'indépendant et de compétent.
Il ne lui reste plus qu'à prendre sa carte au Modem (et à convaincre son beau-frère dans la foulée) mais quoi qu'il en soit, je commence ma campagne avec elle et pour l'Europe.
Or l'un des points qui me satisfait chez elle prêtera sans doute à polémique.
Il s'agit de la position de la Turquie par rapport à l'Union européenne.
Sylvie Goulard avait accordé une interview sur ce sujet dans Questions internationales, La Turquie et l'Europe. Le numéro date de 2005 et sa position a peut-être évolué mais elle me satisfait pleinement et je me fais un plaisir de vous en retranscrire le début (il est possible de se procurer le numéro auprès de la Documentation française) Sylvie Goulard s'exprimait à la suite de Michel Rocard dont j'ai supprimé les interventions, ce qui explique qu'elle ne reprenne pas toujours directement les termes de la question posée :

Quelles sont, selon vous, les raisons qui poussent la Turquie à souhaiter devenir membre de l'Union européenne ?

Sylvie Goulard – Les Turcs se sentent européens et aspirent à nous rejoindre, c’est indéniable ; mais nos dirigeants les ont encouragés en leur donnant de faux espoirs depuis quarante ans. Ils ont nié la géographie, passant outre le fait que 97 % du territoire turc est en Asie, comme 89 % de sa population.


QI – Quelles sont alors, selon vous, les raisons qui conduisent certains à rejeter cette candidature ?

Sylvie Goulard – Ma position est au contraire très pro-européenne ; elle n’est pas fondée sur la peur mais sur ma conviction que nous devons conserver une ambition politique pour l’Union européenne. D’où mes quatre raisons de rejeter ce projet :
– la Turquie n’est pas en Europe ; or nous ne pouvons plus éluder la question des frontières ; c’est nécessaire à la cohésion interne de l’Union européenne ;
– les citoyens n’ont pas été associés au processus de décision et y sont défavorables ou, du moins, s’interrogent ; or on ne peut pas faire l’Union de force, contre la volonté des peuples ;
– l’Union n’a pas des institutions conçues pour accueillir un pays aussi grand, aussi peuplé et différent ;
– les États favorables à sa candidature veulent réduire le budget, or une stabilisation durable de la zone exigerait des sommes considérables. Bref, dans ces conditions, cela ne «marchera pas».


QI – Quels problèmes entraîne à vos yeux la participation à l’Union d’un État dont la population est à majorité musulmane ?

Sylvie Goulard – Aucun directement, l’Union européenne n’étant pas confessionnelle et ne devant pas l’être, mais il ne faut pas croire non plus que l’hétérogénéité ne complique pas les choses. L’Union repose sur la confiance qui est lente à naître quand on se connaît mal et qu’on ne partage pas la même histoire longue. Sans parler des questions liées au statut des femmes, à la laïcité, qui ne sont pas mineures dans des démocraties modernes tendant à établir l’égalité des droits. Accepter que les femmes portent un voile y compris dans la sphère publique, c’est placer une certaine conception de la liberté religieuse au-dessus d’autres principes fondamentaux, parmi lesquels l’égalité hommes/femmes. Pour moi, c’est un recul par rapport à la Déclaration de 1789. Or la laïcité, traditionnellement portée par le kémalisme, pourrait être affaiblie par l’entrée de ce pays dans l’Union européenne. Même le journal pro-turc Financial Times a exprimé des doutes (édition du 4 décembre 2004) et le Premier ministre R. C. Erdoğan a affirmé avoir envoyé ses filles aux États-Unis parce qu’elles ont la « liberté d’être voilées ». Peut-on voir en lui un garant de la laïcité ?

QI – Considérez-vous le fait que l’Union deviendrait frontalière de pays comme l’Arménie, l’Iran, l’Irak, la Syrie serait pour elle un avantage ou un inconvénient ?


Sylvie Goulard – Un inconvénient majeur : nous ne serions plus des tiers pouvant offrir leurs bons services mais partie prenante. Or la Turquie a eu des rapports difficiles avec certains voisins et a encore un conflit ouvert avec l’Arménie ou l’Irak à propos du Kurdistan. Elle contrôle l’eau de la région.

5 commentaires:

Liberté a dit…

La Turquie a-t-elle même sa place dans l'OTAN ? On peut se le demander...

Liberté a dit…

Suite : on peut se le demander quand on lit ce genre d'info :
http://bruxelles.blogs.liberation.fr/coulisses/2009/03/la-turquie-invite-les-caricatures-de-mahomet-au-sommet-de-lotan.html

Pierrick Hamon a dit…

Chère Christine,
Je suis tombé par hasard sur ton Blog : bravo.
Mais avec une nuance + que sérieuse. Je ne comprends pas cette hostilité à la Turquie le pays le plus francophile - enfin juque il y a peu- de toute la région....mais cela les Français l'ignorent..
Ci après mon dernier papier à ce sujet publié dans Armor Mag du 2 avril. Le débat reste ouvert
Amitiés
Pierrick


La Turquie européenne : une chance pour la Bretagne

Les liens entre Bretagne et Turquie sont mal connus, c'est un fait. Pourtant la prestigieuse Université Galatasaray à Istanbul, associée à celle de Rennes pourrait en témoigner. Etudiants et enseignants bretons y sont les étrangers les plus nombreux. Cela crée des liens par delà les stéréotypes et malentendus véhiculés de part et d'autres, notamment au plan religieux. Car c'est bien là le problème : l'Islam fait peur ! Et pourtant l'adhésion de la Turquie constituerait une formidable opportunité de rencontre et développement, économique et commerciale autant que culturelle, beaucoup plus encore pour les actuels Etats européens. Istanbul, ville de tolérance et d'ouverture au monde, a bénéficié, avec et après les héritages de Byzance et Constantinople, de l'influence des plus grandes civilisations méditerranéennes. Même si la Turquie n'a pas encore atteint le niveau de démocratie attendu, elle serait, sur ce chemin, bien plus avancée que d'autres Etats récemment entrés dans l'UE et s'il n'y avait le conflit kurde qui envenime encore une situation héritée de l'ancien gouvernement et surtout du lobby militaire. Diyarbakir, ville jumelée avec Rennes et plusieurs villes bretonnes, en sait quelque chose ; mais cela bouge y compris dans le dialogue avec l'Arménie où¹ vient de se rendre le Chef de l'Etat turc. Les opposants à l'entrée de la Turquie, tout de même plus européenne, géographiquement parlant, que Chypre voisine du Liban, savent ils seulement que la Grèce comme l'Arménie et même nombre de responsables Kurdes, souhaitent que la Turquie puisse intégrer l'Union Européenne ? CQFD
Faut-il s'étonner d'entendre aujourd'hui encore les chrétiens grecs, bulgares, serbes, libanais ou syriens - qui seront soumis pendant cinq siècles au joug ottoman - dire qu'ils ont toujours préféré le « turban turc » au « chapeau latin » ? Constantinople, la ville sainte des Grecs n'a pas été détruite par les musulmans mais bien par les croisés latins qui, le 13 avril 1234, ont procédé à l'un des pires
massacres de l'histoire, celui de toute la population qui était alors en majorité chrétienne. « Si fière de sa culture, Byzance a vu alors s'envoler en fumée des tonnes de manuscrits de l'Antiquité. Car les croisés ont ainsi dépouillé les bibliothèques, les palais et hôtels particuliers, les places et édifices publics de trésors que neuf siècles d'histoire avaient entassés » (Henri Tincq). Faut-il rappeler l'héritage fabuleux de l'Andalousie musulmane qui a mis tant d'années à se relever de la tyrannie obscurantiste d'Isabelle de Castille qui persécuta Juifs et Musulmans?
A tous ceux qui s'intéressent au sujet, je conseille vivement la lectue facile du petit livre de Michel Rocard « Oui à la Turquie »* qui vient tout juste d'être traduit et publié en ce début mars, en Turquie. Les arguments, historiques certes, mais surtout d'actualité y sont si nombreux et difficilement contestables. Une fois de plus Michel Rocard ne craint pas de bousculer les certitudes.
Le Pélerinage islamo-chrétien de Vieux-Marché - en Bretagne -qui rassemble, depuis 50 ans à l'initiative du professeur Massignon, des représentants des trois grandes religions monothéistes, ne nous vient-il pas d'Ephèse, en Turquie ? Quel beau symbole ! L'Orient a toujours été la chance de la Bretagne, et pas seulement par delà les mers.
Ne la perdons pas.
Pierrick Hamon
06 mars 2009 pour le numéro du 2 avril 2009 ArmorMagazine
*Hachette Littérature, 2008

Anonyme a dit…

Si je suis le raisonnement de Mme Goulard, alors la republique de Chypre qui est entierement dans le continent Asie n'a rien à faire dans l'UE ! Pourtant elle fait partie de l'UE et nous avons une frontiere maritime avec le Liban.

Alors Si Chypre l'Asiatique est dans l'Europe pourquoi pas la Turquie Eurasienne?

sex shop sm a dit…

bon post